RDC : L’Union européenne appelle au 2ème round du Dialogue

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La gestion de la transition et le sort de Kabila à l’ordre du jour

–      La présidentielle et les législatives en 2017

Un autre dialogue plus inclusif se profile à l’horizon. Edem Kodjo, facilitateur de l’Union africaine aux négociations qui se tiennent à la cité de l’UA, croyait jouer au malin en tentant une course en solitaire sans la participation de l’aile la plus importante de l’Opposition, à savoir le Rassemblement des forces politiques et sociales acquises au changement. L’Union européenne(UE) vient de le rappeler à l’ordre.

Dans une déclaration au vitriol, faite lundi à Bruxelles au terme de la réunion de son Conseil des Affaires étrangères, l’UE  ne va pas par le dos de la cuillère. Le Conseil a survolé tous les pans de la brûlante actualité de la RDC. Dans la foulée, son communiqué est conciliant, calme les esprits surchauffés  et redonne de l’espoir. Le document traduit le souci de l’UE de sauver la RDC d’une hécatombe.

S’agissant du Dialogue d’Edem Kodjo, l’UE en minimise l’impact sur la crise congolaise. Au contraire, elle en fait une lecture réductrice. « Le dialogue facilité par l’Union africaine à Kinshasa, et soutenu par l’UE en tant que membre du groupe de soutien, doit ouvrir la voie à une nouvelle phase d’un processus politique plus inclusif au cours des semaines à venir. Il devra être clarifié, d’ici le 19 décembre, la manière dont se déroulera la période transitoire jusqu’aux élections », estime le Conseil des Affaires étrangères.

L’UE est d’avis que « la crise politique de la RDC ne peut être résolue qu’à travers un engagement public et explicite de tous les acteurs de respecter la Constitution actuelle, en particulier en ce qui concerne la limitation des mandats présidentiels ainsi que par un dialogue politique substantiel, inclusif, impartial et transparent. Celui-ci doit déboucher, en ligne avec l’esprit de la résolution 2277 du Conseil de sécurité des Nations Unies, sur l’organisation d’élections présidentielles et législatives dans le délai le plus court possible au cours de l’année 2017 ».

Plus menaçante, l’UE indique dans des termes clairs que « si l’actuel mandat présidentiel vient à son terme sans qu’il y ait eu un accord préalable sur le calendrier électoral, l’UE devra considérer l’impact d’une telle situation sur ses relations avec le gouvernement de la RDC ».

Quoi qu’il en soit, « devant les risques d’instabilité dans le pays et la menace que cela constitue pour la région, l’UE restera entièrement mobilisée », promet son Conseil des Affaires étrangères.

A l’instar de la Belgique qui a réduit la durée de séjour des autorités congolaises sur son sol, l’UE s’inscrit dans le même schéma et n’exclut pas « le recours à des mesures restrictives individuelles ». « Les États membres s’accordent dès à présent sur la nécessité de coordonner leur approche en matière de délivrance de visas à l’égard des détenteurs d’un passeport diplomatique ou de service. L’UE utilisera tous les moyens à sa disposition, y compris le recours à des mesures restrictives individuelles contre ceux qui sont responsables de graves violations des droits de l’Homme, incitent à la violence ou qui feraient obstacle à une sortie de crise consensuelle, pacifique et respectueuse de l’aspiration du peuple congolais à élire ses représentants », fait observer l’UE.

Par conséquent, elle entend voir la Monusco (Mission des Nations unies pour la stabilisation du Congo) se montrer plus dissuasive sur le terrain. « L’UE appelle la MONUSCO, dans le cadre de son mandat de protection des civils et dans la limite de ses moyens et de son dispositif, à se déployer de manière dissuasive et demande la pleine coopération des autorités dans la mise en œuvre de la résolution adoptée lors de la trente-troisième session du Conseil des droits de l’Homme », souligne-t-elle.

Réaffirmant son engagement à accompagner le processus électoral en RDC, l’UE se dit « disposée à apporter son soutien, y compris financier, à un processus électoral transparent sur la base d’un accord politique inclusif et d’un calendrier clair agréé par les parties prenantes, et si toutes les conditions sont réunies conformément à la Constitution et à la résolution 2277 du Conseil de Sécurité des Nations Unies ». Aussi salue-t-elle « les efforts considérables de la région pour rapprocher les positions, en particulier lors de la tenue prochaine d’un sommet sur la RDC organisé à Luanda par la Conférence Internationale sur la Région des Grands Lacs, les Nations Unies et l’Union africaine, et d’une réunion ministérielle de la SADC ».

La déclaration de l’UE passe pour un grain dans la machine du Dialogue que conduit à la cité de l’UA le facilitateur Edem Kodjo. Sans porter des gants, la déclaration de l’UE n’est ni plus ni moins qu’un désaveu à la voie choisie par l’émissaire de l’Union africaine. Comme bien d’autres acteurs de la communauté internationale, l’UE est convaincue que seul un dialogue véritablement inclusif permettra d’éviter de précipiter la RDC dans une crise aux effets dévastateurs dans la région des Grands Lacs.

Le deuxième round du dialogue devenant de plus en plus irréversible, l’Opposition qui n’a pas pris part au dialogue de la cité de l’UA doit se préparer, en évitant de crier au triomphalisme. Le « Rassemblement » qui s’est formé autour d’Etienne Tshisekedi doit comprendre que la communauté internationale s’est totalement investie dans la résolution de la crise qui prévaut en RDC. Il est attendu du Rassemblement qu’il de mettre de l’eau dans son vin, en faisant preuve de coopération avec toutes les prenantes au conflit. La sortie de la crise en RDC ne se réglera que par la voie des concessions mutuelles. Le Rassemblement a donc intérêt à adopter ce profil. Dans le seul but de décrispation.

Il y a de grandes attentes dans le prochain round du dialogue. Pour plus de crédibilité du processus électoral, une profonde restructuration de la Céni et de l’administration s’impose. Question de rassurer tout le monde. Car, la MP a quadrillé le terrain en plaçant partout les gens chargés d’exécuter son plan de pérennisation du pouvoir de son autorité morale.

Tous les acteurs politiques et sociaux ont intérêt à emprunter le chemin tracé par l’UE. Se cabrer sur sa position ne va pas résoudre le problème. Majorité et Opposition auront enfin l’occasion, lors du second round du dialogue politique, de débattre dans un cadre restreint des problèmes réels de la RDC.

Ci-dessous, l’intégralité de la déclaration du Conseil des affaires étrangères de l’UE.

 

Conclusions du Conseil des Affaires étrangères de l’UE sur la RDC

L’Union européenne est profondément préoccupée par la situation politique en République démocratique de Congo (RDC). Elle condamne vivement les actes d’extrême violence qui ont eu lieu les 19 et 20 septembre 2016, en particulier à Kinshasa. Ceux-ci ont encore aggravé la situation d’impasse dans laquelle se trouve la RDC du fait de la non-convocation dans les délais constitutionnels du corps électoral en vue de l’organisation de l’élection présidentielle. À cet égard, l’UE rappelle ses conclusions du 23 mai 2016 et réaffirme la responsabilité première des autorités de la RDC dans l’organisation des élections.

1.La crise politique de la RDC ne peut être résolue qu’à travers un engagement public et explicite de tous les acteurs de respecter la Constitution actuelle, en particulier en ce qui concerne la limitation des mandats présidentiels ainsi que par un dialogue politique substantiel, inclusif, impartial et transparent. Celui-ci doit déboucher, en ligne avec l’esprit de la résolution 2277 du Conseil de sécurité des Nations Unies, sur l’organisation d’élections présidentielles et législatives dans le délai le plus court possible au cours de l’année 2017. Si l’actuel mandat présidentiel vient à son terme sans qu’il y ait eu un accord préalable sur le calendrier électoral, l’UE devra considérer l’impact d’une telle situation sur ses relations avec le gouvernement de la RDC.

2.Le dialogue facilité par l’Union africaine à Kinshasa, et soutenu par l’UE en tant que membre du groupe de soutien, doit ouvrir la voie à une nouvelle phase d’un processus politique plus inclusif au cours des semaines à venir. Il devra être clarifié, d’ici le 19 décembre, la manière dont se déroulera la période transitoire jusqu’aux élections. L’UE souligne l’urgence de la situation et l’importance de la participation à un tel processus de toutes les grandes familles politiques et de la société civile, dont la Conférence épiscopale du Congo. Elle appelle la majorité et l’opposition à rechercher les compromis nécessaires portés par un très large consensus populaire.

3.Afin d’assurer un climat propice à la tenue du dialogue et des élections, le gouvernement doit prendre un engagement clair de veiller au respect des droits de l’Homme et de l’état de droit et cesser toute instrumentalisation de la justice. L’UE appelle à la libération de tous les prisonniers politiques et à la cessation des poursuites judiciaires politiquement motivées contre l’opposition et la société civile ainsi qu’à la réhabilitation des personnes victimes de jugements politiques. L’interdiction des manifestations pacifiques, l’intimidation et le harcèlement à l’encontre de l’opposition, de la société civile et des médias ne permettent pas de préparer une transition paisible et démocratique. Dans ce contexte, l’engagement de l’UE dans de nouveaux programmes de réforme de la police et de la justice ne peut être assuré. L’UE appelle la MONUSCO, dans le cadre de son mandat de protection des civils et dans la limite de ses moyens et de son dispositif, à se déployer de manière dissuasive et demande la pleine coopération des autorités dans la mise en œuvre de la résolution adoptée lors de la trente-troisième session du Conseil des droits de l’Homme.

4.Les très nombreuses arrestations qui ont suivi les événements du 19 et 20 septembre suscitent de fortes préoccupations quant au respect des procédures légales et à la volonté de garantir une justice indépendante. L’UE exhorte tous les acteurs, tant du côté des autorités que du côté de l’opposition, à rejeter l’usage de violence. Elle rappelle la responsabilité première des forces de sécurité pour maintenir l’ordre public tout en assurant le respect des libertés fondamentales. Une enquête indépendante doit permettre de dégager rapidement les responsabilités individuelles de chacun. La MONUSCO et le Bureau Conjoint des Nations Unies aux Droits de l’Homme en RDC (BCNUDH) doivent pouvoir effectuer leur travail de documentation sans entraves. L’UE a également pris note du communiqué du Procureur de la Cour Pénale Internationale du 23 septembre 2016, qui a déclaré surveiller avec une extrême vigilance la situation sur le terrain.

5.L’UE réitère sa forte préoccupation face à la situation dans l’est du pays, et en particulier à Beni. Dans ce contexte, l’UE rappelle l’existence de la résolution 2293 du Conseil de sécurité des Nations Unies qui fixe le cadre onusien de mesures restrictives à l’encontre des individus ou des entités responsables de graves violations des droits de l’Homme.

6.Devant les risques d’instabilité dans le pays et la menace que cela constitue pour la région, l’UE restera entièrement mobilisée. Les États membres s’accordent dès à présent sur la nécessité de coordonner leur approche en matière de délivrance de visas à l’égard des détenteurs d’un passeport diplomatique ou de service. L’UE utilisera tous les moyens à sa disposition, y compris le recours à des mesures restrictives individuelles contre ceux qui sont responsables de graves violations des droits de l’Homme, incitent à la violence ou qui feraient obstacle à une sortie de crise consensuelle, pacifique et respectueuse de l’aspiration du peuple congolais à élire ses représentants. Le Conseil invite la Haute Représentante à initier un travail dans ce sens.

7.L’UE rappelle les efforts significatifs qu’elle a consentis ces dernières années pour accompagner le pays et confirme sa disponibilité à les intensifier en réitérant sa demande du 2 juin 2016 au gouvernement d’initier dans les plus brefs délais un dialogue politique au plus haut niveau, conformément à l’article 8 de l’Accord de Cotonou. Elle est disposée à apporter son soutien, y compris financier, à un processus électoral transparent sur la base d’un accord politique inclusif et d’un calendrier clair agréé par les parties prenantes, et si toutes les conditions sont réunies conformément à la Constitution et à la résolution 2277 du Conseil de Sécurité des Nations Unies. Dans ces conditions, l’UE restera engagée en tant que membre du groupe de soutien à la facilitation et travaillera étroitement avec ses partenaires, notamment africains. Elle salue les efforts considérables de la région pour rapprocher les positions, en particulier lors de la tenue prochaine d’un sommet sur la RDC organisé à Luanda par la Conférence Internationale sur la Région des Grands Lacs, les Nations Unies et l’Union africaine, et d’une réunion ministérielle de la SADC.

Bruxelles, le 17 octobre 2016

LE POTENTIEL

1 COMMENT

  1. Qu’entend-on par “le Rassemblement doit faire des concessions” ?
    Il y a une constitution, il y a eu des élections émaillées de plusieurs fraudes en 2011 et en 2006. L’unique concession, et non la moindre, c’est de laisser la kabilie quitter le pouvoir, en l’assurant de ne pas entreprendre de poursuites contre elle.

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